“Maman je n’aime pas CETTE école”. Le jeu de mots est voulu, le titre est écrit par un enfant de 6 ans, tient à préciser Sondes Khalifa, professeur et auteur de cet ouvrage pédagogique qui peut servir de guide pour des parents désorientés dont les repères éducationnels ne correspondent pas aux besoins et aux exigences de leurs progénitures. La haute technologie est passée par là, les enfants sont hyperactifs, de plus en plus attirés par les IT et ne se retrouvent plus dans les schémas et cursus classique de l’enseignement.
Pour Sondes Khalifa, «il s’agit de mettre en lumière les défaillances du système qui uniformise, inhibe les compétences propres et tue la créativité… or c’est exactement ce que demande l’économie actuelle et encore plus celle de demain».
L’ouvrage est bien écrit, langage simple et châtié, il est accessible à tous à condition que l’on prenne la peine de se le procurer.
L’auteur explique: «j’ai écrit ce livre pour vous, parent. Vous dont l’enfant ne veut pas aller à l’école, invente mille raisons à 8h moins quart pour ne pas monter dans la voiture, il a mal au ventre, il va vomir… C’est psychosomatique, vous dira le médecin. Vous, qui ne comprenez pas pourquoi votre enfant est agressif, pourquoi il n’aime pas aller à l’école, pourquoi il est timide, nerveux ou colérique. Adolescent, il sèche les cours. A la fac, il veut arrêter les études, il vous dit que de toutes les façons c’est le chômage qui l’attend et que ça ne mènera à rien. Vous ne savez pas quoi lui dire, vous sentez de l’amertume et de l’impuissance. J’écris pour les centaines de parents que j’ai rencontrés et qui sont plongés dans le désarroi. Les parents de mes étudiants, qui regardent avec un immense chagrin leurs enfants diplômés passer leur temps sur les terrasses des cafés et devant la télé, réalisant que le diplôme pour lequel ils ont donné leurs vies ne vaut pas grand-chose.
Jeune étudiant ou à la recherche d’un emploi, parent, enseignant ou décideur, je n’ai pas pour ambition de vous convaincre de la toxicité du modèle éducatif en place, d’autres l’ont très bien fait dans le passé, avant même que je sois née. J’ai écrit avec le cœur, en espérant donner une vision d’avenir et un espoir à ceux qui les ont perdus».
L’auteur interpelle également ses collègues, enseignants et décideurs car ils sont la responsabilité de la réforme du système éducatif.
Elle fustige également le corps enseignant faisant preuve de beaucoup de courage face à un syndicalisme corporatiste destructeur: «Vous enseignants, vous pouvez détruire une personne avec, un mot, une note. Vous pouvez également déclencher l’envie de vivre et de faire, un élan vers un domaine ou un métier particulier, avec des mots et des gestes simples».
Pr Khalifa n’a pas exclu les élèves et les étudiants de son ouvrage: «pour que vous choisissiez en conscience l’autoroute que vous allez prendre. Car à l’autoroute, on ne peut pas faire marche arrière, ni même ralentir. Je pense à ces étudiants qui ont investi toute leur énergie dans le copier-coller d’une masse de théories figées et de travaux (bien) dirigés. Licence ensuite mastère, pour revenir vers moi en disant avec amertume “Si seulement je savais, si quelqu’un me l’avait expliqué, je n’aurais jamais emprunté cette voie“».
L’auteur revient sur un constat fait depuis plus d’une décennie dans notre pays, le diplôme n’assure pas la qualification ou la compétence. «Aujourd’hui la qualification ne s’obtient plus via l’école, mais via d’autres circuits encore peu visibles et peu fréquentés, dont les centres de formation professionnelle, les centres de formation à l’intérieur même des entreprises, et même sur le web: un monde de possibilités encore inconnues par la majorité des jeunes».
Elle conclut en disant que le monde est en train de changer et que l’on accompagner son évolution.
Le livre est fait en 3 temps: d’abord des scènes de vie qui reflètent les limites du système (du primaire au supérieur). Ensuite un arrêt sur image sur cette génération de “digital natives” et de la transition (éco- géo-politico-climatique) en cours. Enfin des pistes pour booster l’initiative privée dans notre pays en remédiant aux causes originelles qui l’inhibent, depuis le départ, c’est-à-dire sur les bancs de l’école, mais aussi pour repenser l’école/l’éducation en fonction des enjeux du monde de demain (vert- collaboratif et solidaire) ou noir (comme le pétrole) compétitif et prédateur).
Amel Bel Hadj Ali