Produite par la compagnie Dumanle, mise en scène par Sow Souleymane et interprétée par Kompaore Rebecca et Guhei Eve Sandrine, « Quand le temps s’arrête » pièce théâtrale ivoirienne a réussi l’espace d’une heure environ a accaparer le public composé d’étudiants et d’élèves en plus des professionnels et des amateurs du théâtre. La salle El Hamra était archicomble et même les retardataires ont accepté les strapontins pour ne pas rater cette œuvre. Après un long moment de silence qui paraissait interminable, deux comédiennes installées sur des chaises au cœur de la scène ont fini par s’exprimer. Mais les mots qu’elles ont prononcés n’ont fait que les plonger dans un cercle vicieux de questionnement sur le temps qui refuse qui semble suspendu. Dans un dialogue de sourds, les deux femmes sombrent dans un délire autour du temps et se trouvent piégées par elles-mêmes dans une incapacité de communiquer.
Leurs obsession d’inventer des histoires pour passer le temps, et de provoquer des conversations pour combler le silence mortel. Face aux situations absurdes qui frôlent par moment le comique, le public avait du mal à déchiffrer les signes et les symboles de la dramaturgie jusqu’à ce que le voile se soit levé pour laisser apparaitre les clés de compréhension de cette œuvre fortement codée. Le silence et le dialogue impossible ont poussé les deux protagonistes de la pièce à commettre l’irréparable. Une série de tableaux s’enchaîne pour démontrer que l’horreur qui constitue le quotidien africain avait lui aussi pour point de départ des histoires banales. Avec cette pièce qui a réuni deux comédiennes à la fois puissantes et sensibles, maitrisant l’art du comédien dans son intégralité, et avec une scénographie intimiste très dépouillée, Sow Souleymane le metteur en scène a prouvé que le théâtre africain est loin d’être prisonnier du carcan traditionaliste, mais très ouvert à techniques modernes sans pour autant perdre de son authenticité.