Tant attendu par les activistes et les partisans des droits de la femme, le projet de loi intégrale sur la violence faite aux femmes ne cesse depuis son genèse de nourrir espoirs et attentes. Espoirs, de voir le sort de la femme tunisienne réaliser un bond irréversible. Attentes, de parvenir à combler à jamais les silences et insuffisances entachant un dispositif juridique épars et sporadique.
Réunies, samedi, sous la bannière de la ligue tunisienne de défense des droits de l’Homme, les participantes à la campagne nationale de soutien à la loi intégrale sur la violence faite aux femmes, étaient unanimes à croire en la nécessité d’instaurer un dialogue franc et constructif, préalable nécessaire pour amorcer une réforme réussie du système pénal tunisien.
En guise d’exposé de motifs, la magistrate chargée de mission auprès du cabinet de la ministre de la femme, de la famille, Samia Doula s’est exprimée sur ledit projet.
“Le projet en question plaide une vision cohérente et globale sur la protection de la femme.Le souci majeur du législateur étant de parvenir à éliminer les différentes formes de violence conformément aux dispositions de l’art.46 de la nouvelle Constitution”, a-t-elle confié à l’Agence TAP.
“Ce projet aura le double mérite de combler les lacunes juridiques dont souffre le code pénal tunisien et de favoriser la création de nombreux établissements, a-t-elle expliqué.
A ce titre, a-t-elle mentionné, le texte balisera la voie à à une profusion institutionnelle en faveur de la femme.
Il s’agit en l’occurrence de la mise en place d’un centre d’hébergement des femmes victimes, d’un observatoire pour signaler les différents cas de violence contre les femmes et de l’institution d’une nouvelle spécialité au niveau de la police judiciaire en matière d’enquête sur les affaires de violence faite aux femmes.
Texte élaboré par le ministère de la femme et de la famille de concert avec une pléiade d’experts dans ce domaine, le projet de loi en question consacre un chapitre à part entière aux “dispositions générales”.
Dédié à la terminologie utilisée dans le corps du projet de loi, ce chapitre propose de définir avec soin les notions-clés de “violence” et de “victime”. Outre les dispositions générales, ce projet de loi comprend quatre chapitres :
I – Traite de la prévention
II – La protection
III – La pénalisation
IV- Recense les mesures et les établissements de protection des femmes victimes de la violence.
Ce projet de loi tente de tirer au clair la notion de femme victime. A ce titre, il institue une panoplie de droits en faveur de cette catégorie de femmes, telles que l’obligation d’assister la femme victime à exercer son droit d’ester en justice, à obtenir des décisions de justice en faveur de sa protection ainsi que la consécration de son droit à être hébergée au sein des établissements de l’Etat afin de garantir son intégrité physique et la répression des différentes formes de violence exercée à son encontre.
Le projet de loi en question apporte aussi quelques nouveautés en matière de lutte contre l’impunité. Ainsi et à titre indicatif et non limitatif, il propose de supprimer les art.227 Bis et 239 Bis du code pénal, dispositions jugées discriminatoires.
Par ailleurs, Ce texte apporte une nouvelle disposition portant sur la saisine judiciaire. Selon le président de la ligue tunisienne pour la défense des droits de l’Homme(LTDH), Abdessatar Ben Moussa , ce projet de la loi s’inscrit dans le cadre de l’application de la constitution qui préserve les acquis de la femme.
La consécration de l’égalité homme-femme est une responsabilité commune, a-t-il martelé, appelant, à ce propos, les hommes à faire pression sur l’assemblée des représentants du peuple, afin de faire passer ce texte.
Pour la présidente de l’association Beity, Sana Ben Achour, ce projet de loi doit impérativement comporter une acception juridique large de la violence sous toutes ses formes ( violence psychologique, économique, sexuelle…) et ce, conformément, à la déclaration de 1993 sur l’élimination de la violence à l’égard de la femme.
Ce texte, a-t-elle poursuivi, doit également proposer les mécanismes nécessaires pour lutter contre les pratiques sexistes.
La vice présidente de la LTDH chargée des droits de la femme, Halima Jouini a, quant à elle, mis l’accent sur la nécessité de mettre en place des stratégies pour soutenir ce projet et de proposer une vision claire sur les modalités d’application de cette loi.
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