La Tunisienne Maha Zaoui vient d’être nommée responsable du rugby féminin à Rugby Afrique. Un chantier colossal qu’elle a commencé à entamer dans sa fédération depuis plusieurs années
Depuis 2005 qu’elle a découvert le rugby, cette enseignante universitaire dans le management du sport ne s’arrête plus. En 2018, elle se voyait octroyer une bourse de leadership pour le rugby féminin par World Rugby. Cette année, elle vient d’être nommée responsable du rugby féminin à Rugby Afrique, soit à plus grande échelle le poste qu’elle occupe à la fédération tunisienne de rugby.
« J’ai reçu le contrat la semaine dernière », confirme-t-elle à World Rugby (https://www.World.Rugby/). « C’est un nouveau poste, ça n’existait pas avant : Manager générale du rugby féminin à Rugby Afrique. »
Cette nomination ne tombe pas du ciel et valide un parcours entamé depuis de longues années. Mais le coup de pouce commence il y a trois ans lorsque, au Botswana, elle participe à un séminaire en marge du championnat d’Afrique des féminines. L’année d’après, la bourse de World Rugby lui permet d’aller encore plus loin.
La Tunisienne Maha Zaoui élue directrice générale du rugby féminin de la confédération africaine
« J’avais choisi dans le cadre de cette bourse le programme MEMOS en partenariat avec le comité national olympique (Comité International Olympique), qui est un master exécutif en management des organisations sportives : gestion des ressources humaines, financières, stratégie, gouvernance, sponsoring… Il décerne par la suite un diplôme universitaire. La formation a duré une année. Et à la fin, on est obligé de préparer un mémoire de Master et mon sujet était sur le rugby féminin en Afrique avec une stratégie de développement entre 2019 et 2025. »
Les bases sont ainsi posées. « J’ai proposé à Rugby Afrique un projet de développement du rugby féminin à la fois sur le terrain et en dehors : administration, leadership, formation des dirigeants… Tous ces éléments ont fait que j’ai été choisie », explique la titulaire d’un doctorat en management du sport.
Le Sentiment D’être Une Pionnière
La tâche s’annonce colossale et elle ne le cache pas. « Lorsque j’ai reçu la feuille de poste pour savoir ce que je devais faire, je me suis dit : Wouaaaoouh ! », rigole-t-elle.
« C’est un beau challenge car effectivement je vais être en quelque sorte pionnière. Avec toute notre équipe, nous allons écrire l’histoire ; ce n’est pas moi toute seule qui vais mettre en place le rugby féminin en Afrique. Nous allons l’organiser, mieux coordonner l’énergie et je me sens très fière de tout ça.
« C’est pour moi un défi, mais c’est ma manière de travailler. Je me lance des défis difficiles. Je ne vais pas travailler seule, il y aura une équipe de travail, ce ne sera pas le projet de Maha. Je veux impliquer la gente féminine dans toutes les structures. Je me sens bien avec cette idée, je vois qu’on va construire quelque chose. »
Sa nouvelle mission, en étroite ligne avec son travail dans la performance organisationnelle des fédérations sportives, Maha va la mener en étroite collaboration avec toutes les fédérations nationales qui composent Rugby Afrique. Dans 39 fédérations du continent africain, le rugby féminin est d’ailleurs déjà en place, selon un premier audit qui mérite d’être affiné pour établir la future stratégie. En clair, Maha ne part pas d’une feuille blanche. Mieux, son expérience à la fédération de rugby tunisienne devrait énormément lui servir.
La Tunisie, Laboratoire Du Rugby Féminin en Afrique
C’est notamment dans cette instance qu’elle a siégé pendant de nombreuses années avec Khaled Babbou, aujourd’hui le président de Rugby Afrique qui entendait lors de sa campagne développer profondément le rugby féminin sur le continent. « Ce sont les jeunes joueuses de rugby tunisiennes qui sont parties représenter l’Afrique aux derniers Jeux olympiques de la Jeunesse en 2018 ! », a-t-il l’habitude de rappeler.
Miser sur le rugby féminin est depuis longtemps la priorité de la fédération tunisienne. « En Tunisie, nous nous sommes rendus compte que si on avait une chance d’exceller au niveau du rugby, c’était avec les féminines », raconte Maha Zaoui. « On avait essayé avec les garçons à 7, on avait mis beaucoup d’argent et ça n’a pas abouti. Et on s’est rendu compte que si on mettait le paquet sur les filles, on pouvait y arriver. »
Rugby Afrique ne s’y est pas trompé en accordant à la Tunisie les droits d’organisation du championnat d’Afrique féminin de rugby à 7 pour les trois prochaines années, le Africa Women Sevens, qui a lieu en octobre.
« Ce n’est pas un modèle mais on montre que l’on peut réussir avec peu de moyens. Le potentiel y est. Il faut essayer de trouver le maillon dans la chaîne pour exceller. Pourquoi, par exemple, il n’y a aujourd’hui a qu’une seule équipe qualifiée aux Jeux Olympiques ? Il faut réussir à pousser le rugby féminin en Afrique pour y arriver », insiste Maha Zaoui.
Son Ideal Dans Quatre Ans
Suivant les grandes lignes de son mémoire, Maha n’hésite pas à se projeter dans les quatre années à venir, même si les enjeux peuvent se révéler très ambitieux.
« Pour moi, l’idéal pour le rugby féminin en Afrique dans les quatre années serait de voir un championnat d’Afrique des U16 et U18, un circuit Sevens senior (et pas uniquement un tournoi une fois par an), un championnat de rugby à XV (pour relier les quatre coins du continent), une vraie commission de rugby féminin en Afrique en termes de gouvernance et d’administration (ce qui impliquerait d’avoir un manager par fédération) et un championnat national féminin dans chaque fédération affiliée à Rugby Afrique », détaille Maha Zaoui.
Et elle l’assure avec conviction : « Dans quatre ans c’est faisable ! Ça existe déjà en partie, mais il faut mieux le fédérer et travailler ensemble. La cerise sur le gâteau serait d’avoir deux équipes féminines qualifiées pour les JO, si possible pour Paris 2024… »